Témoignages

DE 30% DE CHANCES DE SURVIE… AU MIRACLE !

Le 6 juillet 1991, Marie est transportée à l’Urgence de l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal. Elle est dans un coma sévère en plus d’avoir subi de nombreuses fractures à la suite d’un accident d’automobile. On ne lui donne que 30% de chance de survie…

Sa vie bascule et la nôtre aussi. 
Les années ont passé et nous sommes toujours là, avec Marie, à regarder vers l’avenir. La Fondation Marie-Robert est née, dirigée par Marie. Le miracle s’est produit ! 

Ce n’est que dans la nuit du 8 juillet 1991, qu’un ami de Marie nous informe, mon mari et moi, que notre fille est à l’hôpital. Nous la retrouvons aux soins intensifs dans un coma sévère. Elle est entourée d’un personnel attentif. 
Le lendemain matin, Dr Jacques Provost, Neurochirurgien, nous dit que Marie est paralysée du côté gauche, qu’elle a une importante contusion rénale et qu’elle a subi diverses fractures. 

Les émotions, jusque-là contenues, explosent. Mais nous nous accrochons à l’espoir : «traitez-là comme si elle était votre fille», dis-je au médecin.

Quelques jours plus tard, Marie repose toujours aux soins intensifs. Sa température demeure élevée. Il y a du sang dans ses urines, elle est agitée et fait des gestes répétitifs. Bien que découragée, je n’accepte pas de voir Marie dans cet état. En adoptant un ton rassurant, son médecin me mentionne: « il ne faut surtout pas aller trop vite… ».

Son médecin me fait soudainement remarquer que Marie se tourne toujours vers moi lorsque je parle. Nous réalisons alors que sa réhabilitation ne se fera que si toute la famille la soutient.

Et, un jour, alors que mon fils Marc est auprès de Marie, la visite d’une infirmière du projet TRAUMA nous est annoncée ; l’infirmière nous informe que Marie est éligible à ce projet de recherche clinique. Il porte sur les traumatismes cranio-encéphaliques et est parrainé par la Société de l’assurance automobile du Québec. Elle nous fait comprendre que ce serait un atout de plus pour la survie de Marie.

Puis les événements se bousculent. Le 12 juillet, un orthopédiste l’opère. Le 15 juillet, on la transfère aux soins intermédiaires, mais elle est toujours comateuse. Le 17 juillet, bonne nouvelle, son Neurochirurgien, Dr Provost, rapporte que son état de santé évolue dans le bon sens.

Mais Marie demeure amnésique et incohérente. Elle bouge sans arrêt. Alors que je discute avec son médecin, celui-ci me fait soudainement remarquer que Marie se tourne toujours vers moi lorsque je parle. Nous réalisons alors que sa réhabilitation ne se fera que si toute la famille la soutient. Même si elle ne nous reconnaît pas, elle répète sans cesse le nom des membres de la famille; elle parle de ses dossiers en trois langues différentes… je lui parle en français, elle me répond en espagnol……

C’est ainsi que petit à petit, des parcelles de mémoire lui reviennent. Elle réapprend à boire et à manger. Mais il lui est difficile de se concentrer. Elle traverse encore des moments d’indifférence.

Peu après une scanographie complète, alors que je demande les résultats de l’examen, son médecin me répond aussitôt: «Mais vous l’avez devant vous le résultat…». Les progrès sont devenus apparents, ses gestes sont mieux coordonnés. En fait, en observant Marie, je m’aperçois que les analyses et les examens ne révèlent pas tout.

Le 15 août, on l’opère à la mâchoire. À son retour de la salle de réveil, elle nous adresse un petit signe de la main. L’épouse de mon fils qui est à mes côtés me fait aussitôt observer: « Regardez ses yeux, la lueur est revenue… elle a les mêmes yeux qu’avant ! »

Mais la nuit est difficile. Marie ne peut parler car elle est intubée et sa mâchoire vient d’être « embrochée ». Le personnel de l’Hôpital lui procure un crayon et du papier. Elle réussit à écrire ces quelques lignes : « Je ne peux pas parler, c’est fou… Qu’est-ce qui m’arrive si j’enlève… si je ne prends que les fils de ces appareils… Je ne veux pas mourir ce jour… Où sont mes parents… Vas-tu m’aider à les convaincre… Je ne suis pas folle… J’aimerais mieux être morte … ».

Ce n’est que le 20 septembre que Marie revient à la maison. Au début, elle dort 20 heures sur 24. Au cours des six mois suivants, elle suit un programme de réadaptation. Elle éprouve de la difficulté à marcher, à écrire et, séquelle de son traumatisme crânien, sa vision est trouble.

Malgré tout, Marie veut retourner travailler, pratiquer le droit et surtout revenir dans l’action. Tout au long de sa réadaptation, Marie se disait constamment que ce qu’elle vivait n’avait pas de sens, qu’elle devait faire quelque chose. Et, le 31 août 1992, naissait la Fondation Marie-Robert pour la recherche sur les traumatismes crâniens, après qu’elle eut vu elle-même à l’obtention de Lettres patentes confirmant l’incorporation de cet organisme de bienfaisance.

C’est ainsi que neuf mois plus tard, entourée de ses amis, de sa famille, et appuyée par son Neurochirurgien, Dr Jacques Provost, Marie préside le dîner d’inauguration de la Fondation.

Depuis ce temps, Marie a spécialisé son domaine de pratique; elle se concentre principalement sur ce qui se passe dans le milieu de la santé, plus particulièrement sur les soins prodigués aux personnes victimes de trauma crânien.

Elle a ainsi élargi son champ d’action; en plus d’avoir conscientisé ses collègues avocats et juges sur cette triste réalité, elle a sensibilisé la population, les médias, le milieu juridique, le milieu sportif et le monde des affaires à cette tragique réalité vécue par un nombre grandissant de personnes jeunes et moins jeunes.

En effet, elle ne cesse de plaider cette cause qui a changé le cours de sa vie. Toujours fidèle au rôle que doit jouer un avocat dans la société, elle continue de se consacrer au mieux-être des autres !

Mme Claire Garon Robert 17 novembre 2008
 

UN VIRAGE IMPRÉVU DE LA VIE

Le choc ressenti lorsqu’un proche est victime d’un traumatisme crânien nous rend très fragile, même si l’on veut à tout prix rester fort et confiant. Un profond sentiment de peine et d’impuissance nous saisit face à l’état de santé précaire de l’être cher. Il faut toutefois garder espoir ; c’est essentiel pour soutenir les enfants et toutes les personnes affectées et pour éviter de s’abandonner en sombrant dans le désespoir.

Si, comme dans le cas de ma conjointe Lorraine, excellente avocate et mère dévouée, la victime se retrouve dans le coma, vous êtes alors complètement démuni et vous devez vous appuyer sur des gens forts, confiants et énergiques.

Elle est dans un coma profond, intubée et branchée à de multiples appareils (…) C’est rassurant et effrayant à la fois.

Aujourd’hui, Lorraine se trouve toujours dans un fauteuil roulant, elle parle très difficilement et son bras droit est paralysé, mais l’essentiel est que Lorraine soit en vie : que ses enfants de 6 et 11 ans jouissent de la présence de leur mère et qu’elle ait toute sa conscience. Elle poursuit des thérapies et des exercices pour continuellement chercher à améliorer ses capacités motrices avec l’aide d’une préposée ou d’un parent dévoué.

L’accident

Le 26 février 2006, un beau dimanche ensoleillé, nous avons passé la journée à skier avec un couple d’amis et leurs deux enfants. Au retour de la maison, je ralentis considérablement en amorçant un virage dans une courbe balayée par le vent et recouverte d’une couche de neige et de « glace noire ». Je réussis deux manœuvres pour rétablir la voiture sur la route mais ne peux éviter l’impact avec un VUS qui venait en sens contraire à bonne vitesse. Le choc a été terrible: notre voiture a été déclarée perte totale. Lorsque je reprends conscience, je vois que Lorraine est inconsciente et a la tête penchée en avant. Notre fils William, 8 ans, est déjà à l’extérieur de la voiture et tente d’ouvrir ma portière. Je me tourne vers François qui, âgé de 4 ans, dort toujours dans son siège. Mon ami Robert fait entendre sa voix rassurante: «Louis, je m’occupe des enfants !»

Sur la recommandation de la SQ, Robert emmène les enfants, qui n’ont aucune blessure apparente, à l’hôpital de St-Jérôme ; alors que Lorraine et moi prenons finalement la route de Lachute. Lorraine est entre la vie et la mort : son pouls est très faible. Sur place, ils stabilisent son état et m’annoncent qu’ils doivent la transporter à l’hôpital du Sacré-Cœur de Montréal mais qu’il n’y a pas de place pour moi dans l’ambulance. À ce moment-là, j’ignore que j’ai la rate lacérée.

Je me retrouve finalement dans la pièce voisine de Lorraine. Dès que j’arrive à me lever, je la visite en fauteuil roulant. Elle est dans un coma profond, intubée et branchée à de multiples appareils qui la garde en vie et mesurent ses signes vitaux. C’est rassurant et effrayant à la fois. Lorsque je quitte, au 5e jour, elle ne s’est toujours pas éveillée. Je la visiterai chaque jour au cours des deux mois de coma qui suivront.

Alors que Lorraine est dans le coma depuis environ un mois, l’infirmière en chef me dit que le neurochirurgien aimerait nous parler. Il nous fait une annonce brutale et dévastatrice: « Oubliez la Lorraine que vous connaissiez. Si elle se passe du respirateur et s’éveille, elle sera probablement dans un état végétatif ». Nous étions complètement dévastés. Le jour même, je décide de me fier à mon instinct : Lorraine nous reviendra !

Puis, moins de trois semaines après la rencontre avec le médecin, alors que j’allais prendre congé après avoir passé la journée auprès de Lorraine et que je lui disais au revoir, Lorraine ouvre l’œil gauche tout grand, lève son bras gauche et mets sa main sur ma joue, tout en m’adressant son plus beau sourire: j’en suis bouleversé de joie !! Je voudrais que tout le monde soit là, mais il n’y a que nous deux ! Ce moment est à nous. Je la quitte donc que lorsqu’elle a fermé les yeux, pour se reposer. Lorraine retombe dans un sommeil profond durant près de 10 jours. Je suis le seul à croire à l’éveil de Lorraine durant ces quelques brèves minutes.

L’éveil

Le dimanche 23 avril 2006, alors que je n’ai plus aucune énergie, elle m’adresse encore une fois son plus beau sourire. Elle nous regarde intensément et sourit à pleines dents; nous sommes littéralement transportées de joie. Elle demeurera éveillée durant les heures de notre visite: elle s’est éveillée pour de bon cette fois !

Il faut maintenant passer à la prochaine étape: la réadaptation. La physiothérapie et l’ergothérapie débutent à l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal. Et, le dimanche 3 juin, Lorraine assiste à la première communion de William, sa première sortie de l’hôpital.

La réadaptation

Lorraine part pour l’Hôpital de réadaptation le 6 juin 2006; elle suivra un programme de physiothérapie, ergothérapie, orthophonie, verra la neuropsychologue, la travailleuse sociale, on l’aidera à réapprendre à faire des tâches du quotidien, bref toute une gamme d’activités essentielles à sa réadaptation. Elle y restera jusqu’au 16 mars 2007 avant de rentrer dans notre nouveau plain-pied, que nous finirons d’adapter pour elle. Depuis son éveil, Lorraine a fait des progrès considérables grâce à l’intervention de tous ces excellents thérapeutes. Elle fait preuve d’un courage et d’une volonté remarquables et elle ne s’arrêtera pas là !

À tous ceux qui vivent une telle épreuve, je souhaite courage, patience et surtout, gardez espoir…

Témoignage d’un conjoint 2 juin 2009
 

TÉMOIGNAGE DE M. SERGE CLOUTIER

Il y a vingt ans, on m’aurait demandé de rédiger un témoignage… sur n’importe quoi et je l’aurais produit en un rien de temps, vécu ou imaginaire !

Aujourd’hui, 15 ans après la collision qui m’a fait frôler la mort, sur la route, près de Québec, je trouve l’exercice un peu pénible, moi, l’écrivain en herbe, le raconteur d’histoires. Et je déclare simplement : la réponse est dans la question! Je ne suis plus tout à fait celui que j’ai déjà été !

Je tourne mon aventure dans ma tête tant que je peux, je suis incapable de retracer le moindre détail vécu au cours d’un espace d’environ plusieurs semaines, dont trois dans le coma. J’ai été un mort en puissance, sans jamais le réaliser, mais j’ai ensuite réalisé peu à peu que je vivais littéralement une renaissance ! Je suis reconnu comme un bon vivant, diront les moqueurs qui me connaissent ! Et c’est redevenu vrai.

Oui, j’ai le sentiment d’avoir été sauvé, ressuscité, reconstruit, réadapté à une vie convenable, quoique différente.

Moi, indépendant, j’ai accepté petit à petit qu’on me prenne en charge, qu’on me tienne la main pour simplement marcher, qu’on maide à retrouver mes esprits, et mon esprit, qu’on me « réadapte »! Dur à admettre, difficile à réaliser, plein de joies intenses et de déceptions passagères. J’étais réparable, j’ai été réchappé. Je l’ai échappé belle…

Je me souviens des traitements nombreux que je recevais chaque jour, dans des disciplines qui m’étaient aussi variées qu’inconnues, entouré par des spécialistes de leur domaine respectif, les uns pour les mouvements, d’autres pour le cerveau !

Je n’en revenais pas de voir l’épaisseur de mon dossier médical, avec le grand nombre d’examens, d’interventions… Car, l’un ne va pas sans l’autre, on te sort petit à petit du coma, on répare, on opère, puis il faut te réadapter et te faire retrouver tes activités de la vie quotidienne.

Mais tout ça, tu l’apprends après coup, quand tu as repris suffisamment tes esprits pour lire, réfléchir, converser…

Oui, j’ai le sentiment d’avoir été sauvé, ressuscité, reconstruit, réadapté à une vie convenable, quoique différente. On m’a dit que 25 ans auparavant, je serais probablement resté très différent, pour le pire des scénarios.

J’ai profité des progrès des sciences neurologiques et de ceux et celles qui ont contribué à rendre ces progrès possibles. Et j’en suis conscient ! J’ai pu compter sur des proches parents et des amis irremplaçables!

Je crois vraiment que la recherche dans le domaine relié au cerveau, à la suite à d’un coup brutal, doit devenir une préoccupation plus que jamais. Pour que d’autres Serge Cloutier s’en tirent encore mieux que moi !

Chapitre deux: la famille, un facteur de rétablissement


J’ai relaté en gros comment j’avais vécu l’accident grave subi en 1995 et les suites qui en ont découlé. Mais j’avais en tête un chapitre de ma petite histoire qui pourrait porter exclusivement sur ma famille immédiate. Et ça irait comme suit :


Je dois d’abord préciser lorsque ma conjointe Carmen était à mes côtés dans la petite auto qui nous transportait à Québec, lors retour vers Alma où nous demeurons avec nos trois jeunes filles. De plus, nous étions attendus à la maison pour le baptême de l’enfant de ma nièce. Ma propre mère était sur place pour souligner l’événement.


Le jour du baptême, on nous attend avec le vin d’honneur de circonstance et le rassemblement familial. Mais Carmen et moi, aux soins intensifs de l’Hôpital Enfant Jésus de Québec, sommes dans le coma !!! C’est après les précautions d’usage et des tentatives nombreuses et variées que l’hôpital informe ma sœur, qui en informe ma fille, qui en informe ma mère, que nous sommes blessés sévèrement. L’angoisse intensive se mêle au bonheur du baptême. C’est un bouleversement majeur dans la vie de ceux qui nous aiment et que nous aimons.


Ma fille aînée est en Ontario pour travailler comme étudiante et est rejointe pour revenir à la maison, ce quelle fait tant bien que mal, seule, en autobus, accompagnée des monstres de l’inquiétude et du désarroi !


Ma sœur, qui est ma voisine, prend littéralement nos trois filles en adoption temporaire. Elles ont respectivement 18, 16, et 14 ans et s’installent chez leur tante Lucie pour un bon bout de temps. Dès lors que la nouvelle se répand que nous « reposons » aux soins intensifs, les 10 frères et sœurs de ma conjointe, leur mère, les conjoints, tous ceux qui sont nos proches se remplacent à notre chevet, à tout de rôle, comme des héros devenus pour nous!


Je crois sincèrement que l’attachement qui nous est porté par les familles, par nos enfants et par nos mères, sont des facteurs de notre rétablissement relatif optimal, à Carmen et à moi.

En supportant la recherche « neuro-traumatique », nous misons sur les atouts les plus naturels, les plus efficaces, les plus proches que sont les parents…les amis(es)… Je crois en cette cause et veut y apporter mon humble contribution. Et vous ?

Serge Cloutier 24 août 2010